LA RECHERCHE


GEOLOGIE REGIONALE ET DE L’AVEN DU MONT MARCOU

Le secteur du Mont Marcou se situe sur le versant nord de la Montagne Noire, au nord de la zone axiale granitique et métamorphique. L’ensemble est un élément important de la chaine varisque européenne. Ce versant est formé d’un ensemble d’écailles de charriage d’âge hercynien, constituées de roches sédimentaires, volcano-sédimentaires et volcaniques d’âge Cambro-Ordovicien. Ces écailles s’empilent du NW vers le SE. Le Mont Marcou serait à la limite de l’Unité d’Avène-Mendic et de celle de Mélagues (hypothèse remise en question par nos observations). Le bassin houiller du Carbonifère supérieur formé lors d’une phase d’extension post-orogénique recoupe ces formations.

Depuis les années 1950, une controverse particulièrement animée existe : lors de la collision continentale, le Languedoc est-il monté vers le Nord ou, à l’inverse, un haut-plateau analogue au Tibet s’est-il avancé vers le Sud pour chevaucher le Languedoc ? Depuis les années 1970, l’hypothèse Nord -Sud tient la corde, sans toutefois satisfaire pleinement les géologues. En effet, les critères utilisés pour reconstituer le déplacement des terrains sont fragiles et l’origine méridionale des sédiments déformés n’est pas compatible avec l’hypothèse de charriage vers le Sud.
 Une équipe de l’Université de Toulouse Noire a montré que les terrains ont été charriés vers le Nord pendant un mouvement de coulissage, appelé décrochement, le long de la faille des Cévennes. Ce résultat expliquerait l’origine méridionale des terrains et intègre tous les critères de déformation dans un schéma combinant compression et décrochement.                    

L’étude montre que le sens de glissement le long de la faille des Cévennes s’est inversé par la suite, alors que la chaîne varisque acquérait sa forme finale. Le schéma de la collision se trouve ainsi passablement modifié en privilégiant les grands décrochements qui ont contribués à fragmenter la chaîne de montagne

Inversion du sens des contraintes le long de la faille décrochante des Cévennes ( fig. D.CHARDON et al.)


LA COLORATION VERTE DES CONCRETIONS

–  1986 : CAVE MINERALS OF THE WORLD par C.A. HILL et P. FORTI

En couverture, photo de la salle des vertes du Marcou !

La couleur serait provoquée par des carbonates de cuivre. (Malachite)

–  1992 : DETECTION DU NICKEL 

Une analyse d’une concrétion verte par la COGEMA révèle la présence de Nickel.

– 2000 : FLEURS DE PIERRE par P. CABROL et A. MANGIN

Concrétions d’aragonites aciculaires et massives colorées en vert par la présence de Nickel, sous la forme d’un minéral silicaté qui est à l’origine de la couleur. Les analyses font apparaître la présence de 1 à 2 % de nickel sans que l’on connaisse la forme sous laquelle il apparait. Un diagramme de fluorescence X et une teneur égale à 2% de Ni sont cités. 2% de Ni (en masse), c’est énorme ; c’est à peu près la teneur moyenne des riches minerais de Nouvelle Calédonie.

–  2014 : CARACTÉRISATION DE SPELEOTHEMES VERTS DANS LE GRAND AVEN DU MONT MARCOU par J. YANS et al….

Université de Namur, Département de Géologie, Institute of Life, Earth and Environment, ILEE, Belgique

Cette étude avait pour objectif la caractérisation minéralogique et géochimique de spéléothèmes verts d’aragonite de l’aven du Mont Marcou (Hérault, France). Au moyen d’analyses de diffraction aux rayons X, microscopie électronique à balayage, spectrométrie Raman, microsonde électronique et des analyses géochimiques ICP-MS en solution, la présence d’un phyllosilicate de nickel vert a été mise en évidence dans ces spéléothèmes. Le minéral forme des cristaux tabulaires dans la partie externe des spéléothèmes, ce qui induit une coloration vert foncé. Les analyses géochimiques mettent en évidence, outre une forte teneur en Ni (jusque 30% pds), des concentrations variables en éléments chalcophiles (Pb, Zn, As, Sb…) ainsi qu’en uranium (près de 0,1% pds), mais une concentration faible en Al (environ 0,02% pds).

–  2023 : OCCURRENCE DE NEPOUITE DANS LES SPELEOTHEMES VERTS DE L’AVEN DU MONT MARCOU

Martin Vlieghe1,2, Gaëtan Rochez1,2, Stéphane Pire-Stevenne2, Jean-Yves Storme, Augustin Dekoninck, Yves Vanbrabant3, Olivier Namur4, Yishen Zhang4, Alicia Van Ham-Meert4, Jean-Pierre Donnadieu5, Michel Berbigé5, Jean-Luc Hasbroucq5, Johan Yans1

1 Université de Namur, Département de Géologie, Institute of Life, Earth and Environment, ILEE, Belgique
2 Groupe de Recherche et Photographie en Spéléologie
3 Geological Survey of Belgium, Royal Belgian Institute of Natural Sciences, Brussels, Belgium
4 Department of Earth and Environmental Sciences, Katholieke Universiteit Leuven, Belgium
5 Association Mont Marcou, Castanet-le-Haut, France

Au moyen de nouvelles analyses, la présence d’un phyllosilicate de nickel vert, la népouite ((Ni,Mg)3Si2O5(OH)4), a été mise en évidence dans ces spéléothèmes. La népouite forme des cristaux tabulaires dans la partie externe des spéléothèmes, ce qui induit une coloration vert foncé.


A LA RECHERCHE DU NICKEL

  • Une campagne de prélèvement d’eau (accompagnée de levés géologiques) a été réalisée dans les sources au pied et dans la falaise du Mont Marcou. L’objectif était de faire un inventaire géochimique des eaux en amont des avens. Les prélèvements ont permis d’échantillonner 9 sources (MMA 1 à 9). Un échantillon (MMA 3) était positif en Nickel (320 µg/L), ce qui est très significatif.
  • Cette eau sort d’une source dans les grès lités au nord de l’Aven Marcou 1 et surtout…. en amont de la faille des vertes. Le nickel a donc une origine dans le niveau de grès immédiatement superposé aux dolomies et calcaires.

Les différentes analyses (eau et roche) ont permis de localiser l’origine des anomalies géochimiques en nickel dans les grès quartzites du Cambrien inférieur qui surmontent par un contact anormal (?) les séries carbonatées au sommet desquelles se développe l’aven du Mont Marcou.

Dans ces grès, E. DRANSART a identifié, au MEB, des minéraux particuliers tels que l’apatite (phosphate à base de calcium), du zircon (silicate de zirconium), et des minéraux titanifères, à priori de type ilménite. Ces minéraux sont des témoins d’une origine volcanique des sédiments qui ont conduits à la formation des grès (sédiments volcano-sédimentaires). Les cendres volcaniques peuvent être riches en métaux, dont potentiellement le nickel. Lors de phases métamorphiques et/ou hydrothermales il est remobilisé avec des sulfures de fer (Pyrite).

L’érosion tertiaire entraine la mise à l’affleurement de ces grès et une altération météorique qui oxyde les pyrites (tâches rouilles). L’eau de percolation dans les fissures (diaclases, schistosité) met en solution le nickel que l’on retrouve dans la source MMA3, à de fortes teneurs (300 ppm).

Cette eau va rapidement s’infiltrer à proximité du contact grès/dolomies à la faveur de fractures ouvertes altérées, telle la faille de Vertes, orientée Est-ouest.

 L’eau chargée en Nickel et autres métaux va percoler dans cette faille jusqu’à rencontrer des concrétions aragonitiques, très localisées dans l’aven du Marcou (Vertes et Grande Diaclase). Elles se développent au contact de niveaux dolomitiques plus riches en magnésium. L’eau chargée en nickel va libérer du nickel sous forme d’un précipité vert (la népouite) en périphérie des concrétions, à la faveur de phénomènes qui restent à élucider.

C’est un processus qui est encore en cours de fonctionnement comme le révèle les analyses de l’eau d’égouttage des concrétions.


HYDROGEOLOGIE

RELATIONS AVEN DU MARCOU – RESURGENCE DE FONTCAUDE

Depuis 1949 (M. LAURES), l’hypothèse sur le drainage hypogène des eaux est celle d’un drainage du Marcou vers la résurgence de Fontcaude en suivant le contact dolomies / grès. La distance à vol d’oiseau est de 1200 m pour 90m de dénivelée (altitude fond du puits du grand Cèdre). Malgré une tentative de coloration en 1969 (J-L VIALAT), aucune liaison hydrologique n’a été encore prouvée. La source de Fontcaude est l’alimentation principale du syndicat des eaux Mare-Libron.

Les derniers travaux ont permis de localiser deux zones d’infiltration principales dans l’aven.

  • Au fond du Grand Puits du Cèdre
  • Au milieu de la Grande Diaclase (réseau actif du solitaire)

Ces points feront l’objet d’une campagne de coloration.

L’étude géologique montre que l’aven se développe en profondeur sur un accident N 30°, légèrement penté vers le SE. Il sert de drain hydrologique majeur au système. Ce n’est pas le contact grès/dolomies qui draine les eaux souterraines.

L’analyse des hydrogrammes de la Source de Fontcaude montrent qu’il y a plusieurs types d’eaux :

  • Première phase : arrivée d’eaux froides de surface peu turbides et froides
  • Deuxième phase : eaux plus chaudes, très turbides (sédiments ?), d’origine karstique, C’est la vidange des conduits avec remplissages (grés, quartz, sables dolomitiques)
  • Troisième phase : vidange du système karstiques, eaux moins chargées

Le décalage dans le temps de crue est de 4 jours : preuve de la mise en charge de réseaux conséquents ?

Les données de traçages de 1969 et 1996 révèlent l’existence d’au moins deux systèmes hydrogéologiques dans la bande des dolomies cambriennes d’Avène-Marcou :

  • A proximité et parallèlement au contact de la couverture schisto/gréseuse, l’eau est guidée par des failles N30° en relai, vers le SW sur une distance de 5500 m et 380 m de dénivelée. Ce n’est pas le pendage des couches qui est le guide principal. L’Aven du Marcou serait un regard sur ce trajet souterrain. Il est jalonné, en surface par des effondrements, des indices de karstification et une morphologie de cirques et de ravines.
  • Un deuxième système reliant Rials-Serviès aux sources d’Avène a été démontré par les traçages de J-C VALAT, soit une distance de 8300 m pour 350 m de dénivelée. Là aussi le drainage est perpendiculaire au pendage général des formations. En surface cette direction est soulignée par les vallées des ruisseaux de Grave et du Rieussec.

HYPOTHESE SUR LA FORMATION DE L’AVEN

Scénario

DEPOT d’une série d’âge Cambrien (540- MA) très diversifiée, avec des formations volcaniques et sédimentaires (carbonates, grès, argiles), le tout ayant subi un métamorphisme d’âge hercynien (330 MA).


BIOSPELEOLOGIE

Article de C. BOU dans Spélunca 1970 n°3 :


BIBLIOGRAPHIE SPELEOLOGIQUE SUR L’AVEN DU MARCOU

  • 1931 DE JOLY Robert – CR sommaire des Explorations faites par divers groupes de la Société Spéléologique de France – Spélunca – Bull du Spéléo Club de France n°2 pp.93-94.
  • 1949 LAURES, Maurice – Camp spéléologique dans la région de Saint-Gervais-sur-Mare (Hérault). Spélunca 3-ème série, n° 3, pp. 15–25.
  • 1962 TREMOULET R – L’Aven du Mont Marcou. Bull. Soc. Rech. Spéléo. Sorèze, n°2, pp2-3.
  • 1965-1966 CATALO, Pierre – Mes souvenirs sur le Marcou. Travaux et Recherches. Bull. Fédé. Tarn. Spéléo-Archéol, n°4 pp15-27.
  • 1965-1966 LAUTIER J. – L’Aven du Mont Marcou. Fiche technique. Travaux et Recherches. Bull. Fédé. Tarn. Spéléo-Archéol, n°4 pp11-14.
  • 1965-1966 RAYNAUD Claude – L’Aven du Mont Marcou. Expédition 1966. Travaux et Recherches. Bull. Fédé. Tarn. Spéléo-Archéol, n°4 pp28-35.
  • 1970 BOU, Claude – Le grand aven du Mont Marcou. Spélunca, n° 3, pp. 135–142.
  • 2005 ASSOCIATION MONT MARCOU – Grand nettoyage. Spéléoscope, n° 26, pp. 16–19.
  • 2012 ASSOCIATION MONT MARCOU – L’association Mont Marcou : protection, valorisation et étude du grand aven, Saint-Geniès-de-Varensal (Hérault). Spélunca, n° 126, pp. 15–18.
  • 2013 SALMON, Jean-Michel – Hérault, jonction des avens du Mont Marcou n° 1 et n° 2. Quand le rêve devient réalité… Spéléo Magazine, n° 83, pp. 14–19.
  • 2017 ASSOCIATION MONT MARCOU, « Grand Aven du Mont-Marcou : les Vertes »  Spéléo Magazine, nos 97-98,‎ janvier/juin 2017, p. 64–67.

       

BIBLIOGRAPHIE SCIENTIFIQUE REGIONALE

1949 LAURES Maurice – Camp spéléologique dans la région de St. Gervais-sur-Mare [Annales de Spéléologie. T. IV-fasc.1 pp.22-23           

Avens Marcou 1 et 2 Hydrogéologie                     

1949 GEZE Bernard – Thèse et carte géologique de la Montagne Noire et des Cévennes Méridionales

Géologie des nappes de la Montagne Noire

1957 DELFOUR Jacques – Etude géologique et métallogénique des Monts de Saint Gervais -DES Montpellier                                                                       

Stratigraphie du Cambrien

1970 BOU Claude – Le grand aven du Mont Marcou -Spélunca 3 1970

Topographies Hydrothermalisme Hydrogéologie

1971 VALAT J-L – Introduction à l’étude du karst des Monts de Lacaune -Thèse CERGH Montpellier

 Hydrogéologie Traçages

1973 ROLET Joël – Contribution à l’étude géologique des Monts de l’est de Lacaune -Thèse 3-ème cycle Orsay                                           

Cartographie 1/25000, stratigraphie du secteur

1973 ROUCHY Jean-Marie – Etude géologique et métallogénique de la Haute Vallée de l’Orb Thèse 3-ème cycle Paris VI.                        

Géologie, Métallogénie, Nickel La Rabasse

1976 BOULANGER Aimé-Henri – Fiches BRGM Mont Marcounet

 Coupes affleurements géologiques

1976 POUGET J.J – Inventaire gîtologique et contexte métallogénique des Monts de St Gervais – DES USTL Montpellier.                                                 

Géologie, métallogénie

1980 PRIAN Jean-Pierre – Les phosphorites cambriennes du versant septentrional de la Montagne Noire et au sud du permien de Camarès – Thèse Paris VI

 Stratigraphie et genèse des phosphorites

1981 FAVORY François – GAZELLE François – Modelé karstique et comportement hydrologique des calcaires primaires dans le sud du Massif Central – Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, tome 52, fascicule 2, 1981. Géographie physique

 Modelé karstique régional

1988 MENSI Gabriel. Etude pétrogénétique des occurrences alumineuses de l’unité d’Avène Université Scientifique et Médicale de Grenoble.                                    

Etude blavièrites

2002 TORMO Nicolas – Livret d’excursion du Cambrien et Ordovicien des Monts de l’Est de Lacaune. (Unités d’Avène-Mendic et Mélagues).

Stratigraphie, tectonique, paléogéographie

2007 CLAUSEN Sébastien – ALVARO J. Javier – Phosphorites coquilles du Cambrien inférieur du nord de la Montagne Noire, en France – Geological Society, London, Publications spéciales, 275, 17-28                                                                                                  

 Calcaires à Héraultia

2013 DEVAERE Léa – Microfossiles à paroi squelettique du Cambrien inférieur de Montagne Noire (Sud de la France) : apports chronostratigraphiques, paléogéographiques, paléobiologiques et phylogénétiques.                                                                      

Datation Cambrien avec hyolithes

2014 ALVARO J. Javier et al. – Stratigrafic review of the Cambrien-Ordovicien inf. volcanosedimentary complex north Montagne Noire. Stratigraphy vol.11 n°4. 

Stratigraphie du cambrien. Corrélations régionales

2016 GUISTI Christian – Aspects of geodiversity of Palaeozoic limestones in the Black Mountains of southern France. Acta Geographica Slovenica, Anton Melik Geographical Institute.                                                                                              

 Géomorphologie

2018 PADEL Maxime – Evolution de la provenance sédimentaire au cours du Cambrien-Ordovicien Inférieur le long de la marge occidentale péri-gondwanienne. Exposé BRGM DRG/GSO.                                                                                       

Paléogéographie du Cambrien